Pourquoi je soutiens « Gauche Libérale »
Quand Edouard m’a proposé il y a deux ans de fonder à ses côtés Alternative
Libérale et de prendre en main la communication du parti, il était clair que
nous n’allions pas créer un nouveau parti de droite sur le modèle de Démocratie
Libérale. Au contraire, il s’agissait de tirer les leçons des impasses du passé
et de fonder un mouvement d’un type nouveau, déterminé à transformer l’image
que les Français se font du libéralisme.
J’avais adhéré un an plus tôt à Liberté Chérie, après avoir entendu Sabine
sur une radio refuser le qualificatif de droite, saluer Bernard Kouchner et
revendiquer la présence dans l’association de libéraux de gauche. C’est la
première fois que j’entendais cette expression en France. Ayant un temps pensé
m’engager, sans trop d’illusion, auprès des radicaux de gauche, c’est avec
enthousiasme que je pris ma carte à LC et fit la connaissance de ce couple
incroyable.
Mais cet enthousiasme devait être bientôt mis en difficulté. Ma déception
fut grande devant le poujadisme et le simplisme de nombreux adhérents de
Liberté Chérie, plus soucieux de casser du syndicaliste et de supprimer l’ISF
que de libertés individuelles et de démocratie. Participant à une campagne
téléphonique pour inviter les militants à participer à une manifestation
anticastriste, je compris qu’il ne devait pas y avoir beaucoup de libéraux
authentiques dans les fichiers de l’association, en tout cas fort peu qui se
souciaient de la liberté des cubains. Enfin, la rencontre de plusieurs
militants du FN lors de manifestations de Liberté Chérie vint à bout de ce
qu’il restait de mon enthousiasme initial.
Je n’ai jamais tu mon étonnement et ma réprobation devant ces dérives,
appelant sans relâche à une évolution du positionnement de l’association afin
qu’elle revienne à ses principes fondateurs. C’est sur cette base qu’Edouard me
proposa de participer à l’aventure AL et que je rendis ma carte à LC.
Deux ans de travail et un échec électoral plus tard, la tentation est forte
pour certains de remettre en cause l’approche originale imaginée par les
fondateurs, quitte à jeter le bébé avec l’eau du bain.
Ainsi, nous nous serions trop éloignés de la ligne « historique »
du madelinisme, défendue par les associations libérales « historiques »,
nous aurions déstabilisé notre « électorat naturel » en prenant des
positions radicales sur les libertés individuelles, nous aurions cédé à la
social-démocratie en préférant Bayrou à Sarkozy, ou en ne succombant pas à
l’anti-syndicalisme pavlovien.
Et tout ça, nous l’aurions fait dans l’espoir vain de parler à des électeurs
fantômes, dont il serait acquit qu’ils ne sont pas libéraux, j’ai nommé les
jeunes urbains.
Pourtant, la nouvelle génération des villes, qu’on appelle un peu vite
bobos, est pétrie de valeurs humanistes, d’antiracisme, d’internationalisme,
des lumières démocratiques de 1789 et de l’esprit libertaire hérité de mai 68.
S’ils votent à gauche, c’est par générosité ou au nom de leurs libertés,
certainement pas pour nationaliser les entreprises ou contester le
libre-échange.
Ils savent l’impasse du socialisme, sont nés avec Internet et l’Europe sans
frontières, n’ont jamais été syndiqués et ne connaissent du marxisme que
l’effigie pop du « Che ». Leur boulot, c’est les stages payés au
lance-pierre et un CDI au SMIC pour meilleur horizon. Ils ne misent pas un
kopek sur leurs chances de toucher une retraite, sont lassés des contrôles
d’identité à répétition et réfléchissent à s’exiler à Londres, Prague ou
Barcelone, quelque part où « ça bouge ».