
Notre pays a connu la révolution la plus radicale du continent européen.
L'absolutisme monarchique et les ordres privilégiés ont été mis à bas, d'abord
philosophiquement par le siècle des lumières, puis politiquement et
économiquement par la révolution libérale de 89. Contrairement aux nombreuses
autres nations qui ont progressivement vidé la monarchie de son pouvoir en
conservant son apparat, la France a choisi une république prônant la liberté et
l'égalité entre tous. Pourtant, curieusement, plus de deux siècles après cet
événement d'importance planétaire, il semble que notre pays, toujours aussi
républicain en apparence, redevient l'hôte des privilèges, dans le vrai sens du
terme, à savoir des droits particuliers qui sont accordés aux uns et pas aux
autres. Les principes libéraux de 89 ont été oubliés au fur et à mesure
d'une remontée du dirigisme. L'absolutisme monarchique a été remplacé par un
absolutisme social qui peut se permettre tous les excès, fort de la caution
morale que lui donne son combat pour la "justice sociale". Dans cette société
qui produit quatorze mille pages de textes réglementaires par an et où les
dépenses publiques atteignent 56% du PIB, les fonctionnaires jouent un rôle
central qui n'est pas sans rappeler celui du clergé dans l'ancien régime.