Le mythe climatique

Voici un ouvrage qui aborde la question de la nouvelle science climatique sous l'angle des mathématiques, de la logique et de l'épistémologie. Le propos est toujours intéressant au fil des chapitres malgré une étonnante faute de raisonnement à caractère passionnel qui constitue en fait le principal sujet de cet article. Heureusement ce dérapage n'a pas d'impact sur le reste de l'ouvrage dont on trouvera un résumé ci-dessous.

Le livre débute sur une analogie du carbocentrisme avec le mythe des "canaux martiens" qui est saisissante.

Les erreurs de méthodologie du GIEC et la façon dont s'est construite la théorie carbocentriste sont passées au crible de l'analyse. Il s'agit moins pour l'auteur d'argumenter sur les thèses des forces en présence que de briser la notion de consensus tant mise en avant par les décideurs politiques.

L'auteur montre également qu'avec les mêmes données, on peut aboutir à des conclusions très différentes suivant les outils statistiques que l'on utilise. Il existe par exemple de multiples façons d'établir une moyenne et de construire la courbe censée en découler.

Les effets pervers des modèles informatiques sont évalués, notamment la tentation de modifier le modèle pour toujours coller à la réalité. La climatologie perd dans ce cas son caractère scientifique en devenant "irréfutable" suivant le célèbre critère de Karl Popper.

L'auteur aborde le parallèle que certains carbocentristes tentent d'établir avec le pari de Pascal pour rappeler que ledit pari était mathématiquement faux (en plus de sa modélisation discutable).

Le chapitre sur la pseudo-science climatique est parmi les plus intéressants. Benoît Rittaud y fait l'hypothèse que toute science possède un pendant pseudo scientifique : l'astronomie et l'astrologie, la chimie et l'alchimie, la physique et la parapsychologie, la médecine et les "guérisseurs", les mathématiques et la numérologie  Dans le cas de la climatologie Benoît Rittaud baptise sa pseudo-science associée  la "climatomancie" et il en donne la définition suivante : art divinatoire visant à déduire du comportement humain l'avenir climatique de la terre, dans l'idée de prescrire à chacun des actions de pénitence.

Venons en à ce que nous considérons comme une faute de raisonnement et d'éthique. L'auteur, qui prend un luxe de précautions pour apparaître objectif et non partisan, ne craint pas d'écrire page 6 :

Malgré cette mise au point, je ne puis ignorer qu'aujourd'hui, en me montrant sceptique sur la «crise climatique », je me fais l'allié objectif d'opinions politiques sans rapport avec le climat. C'est pourquoi il m'aurait été incomparablement plus confortable de partager la position actuellement dominante sur le sujet. J'aurais aimé faire partie de ceux qui «tentent d'éveiller les consciences», être aux côtés d'experts portant courageusement le flambeau de la science face à la médiocrité et à l'égoïsme humain. Malheureusement pour mon confort intellectuel, la pertinence d'une opinion sur un sujet scientifique n'est pas proportionnelle à la sympathie que j'éprouve. pour l'idéologie de certains de ses défenseurs. Jean Rostand a par­ticulièrement bien souligné ce type de tension lorsqu'il écrivait en 1956 que «rappeler cette triste aventure [ ... ] n'est pas pour le plaisir [d' ] attaquer - sous un prétexte scientifique - une conception sociale que nous tenons pour éminemment respectable et à laquelle nous serions près de nous rallier» si, expliquait-il, elle ne se faisait pas le complice de l'affaire Lyssenko, qui occupa l'Union soviétique sta­linienne pendant des années avec une improbable « biologie proléta­rienne» prétendument fondée sur l'idéologie marxiste. Je fais miens ces propos de Rostand et, comme lui peut-être à l'époque pour l'af­faire Lyssenko, je me désole que le contexte autour de la question du réchauffement climatique me contraigne à une telle mise au point.

Le propos est pour le moins étonnant et l'exemple de Jean Rostand plutôt "osé" quand on connait le nombre de victimes du communisme et du stalinisme. Cinquante millions de morts pour le premier dont vingt imputables au second, des déportations, des souffrances atroces pour des millions de russes et dans les pays voisins, la misère et le sous développement pour les autres. Cette idéologie, a utilisé une science dévoyée pour renforcer ses théories, comme l'écologie politique le fait aujourd'hui dans plusieurs domaines scientifiques. Et Benoît Rittaud ne trouve pas mieux que de citer Jean Rostand  qui se défend de vouloir attaquer une "conception sociale éminemment respectable" au motif que la science qu'elle utilise n'est pas honnête.

Benoît Rittaud ferait mieux de s'interroger sur ses sympathies politiques, comme Jean Rostand aurait du le faire avant lui. Les opposants "politiques" aux théories carbocentristes méritent peut-être plus de respect ou tout au moins de curiosité de la part de l'auteur. Ceux qui ont tout de suite décelé le caractère suspect de cette nouvelle pseudo-science sont peut-être, toutes proportions gardées, les dénonciateurs d'un phénomène politique dont les méfaits débordent largement le simple détournement scientifique.

Mais Benoît Rittaud refuse catégoriquement d'examiner les dessous de l'affaire. D'ailleurs il le dit clairement à la fin de l'ouvrage (page 200) :
Je n'accorde aucun crédit à l'idée que le carbocentrisme aurait été monté de toutes pièces pour de basses questions mercantiles ou politiciennes, ni même à celle selon laquelle il ne se maintiendrait sur le devant de la scène que parce qu'il satisferait les intérêts de tel ou tel groupe
.

Depuis 2005 le protocole de Kyoto a couté plus de 600 milliards d'euros. Selon les évaluations de l'AIE (Agence Internationale de l'Énergie) le passage à une économie sobre en carbone justifierait un effort de 10 500 milliards de dollars d'investissement d'ici 2030 pour réduire la température de 2° (l'évaluation date de 2009).  Cet "effort" décidé par les politiques et financé in fine par les contribuables, transitera bien entendu toujours par les caisses des États qui, selon leur organisation et leur efficacité, prélèvent entre 20 et 50 % des sommes pour faire fonctionner l'immense machine administrative qui contribue à la réélection de leurs dirigeants.

Aucune raison en effet de suspecter de "basses questions politiciennes".

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