Marianne2.fr supprime la possibilité de commenter ses articles

Marianne2.fr, canal web de l'hebdomadaire Marianne dont il partage la ligne éditoriale néo-jacobine; vient de supprimer purement et simplement la possibilité de commenter les articles publiés sur son site. 

Pour justifier cette reculade, Marianne2.fr a envoyé un courriel (voir ci-dessous) à tous les "Mariannautes" enregistrés.

Dans ses explications le journal se présente comme une victime : "quelques individus addictes de l’invective et de l’éructation décourageaient de poster des commentaires tous les adeptes du débat.".

Quand on connait le ton général de ce champion de la pipolitique, ses unes agressives, le niveau de son argumentation et de ses attaques, l'argumentaire ne manque pas de piquant.

Il aurait donc fallu que les Mariannautes commentent sereinement et paisiblement les articles belliqueux ou malveillants publiés par les journalistes du tabloïd et par ses ineffables "blogueurs associés". Pas un mot plus haut que l'autre de la part des commentateurs, et Marianne2.fr aurait pu continuer à diffuser leurs notes avec une "liberté presque totale" (sic).

Dans son courriel Marianne2.fr précise : "cette dérive décourage tous ceux qui souhaitent simplement débattre de façon courtoise des sujets qui les intéressent".

Pour se persuader des manières courtoises de Marianne2.fr il suffit de relever, dans le même courriel, les qualificatifs attribués aux commentaires perturbateurs et à leurs auteurs : invective, éructation, délinquance verbale, imbécillités, dialogues idiots, hooligans du Net, pissotières sémantiques, sauvageons numériques.
Belle leçon de modération verbale donnée en seulement trois paragraphes !

Ceci dit, les justifications de Marianne2.fr ne tiennent pas la route. Comment "quelques individus" peuvent-ils décourager "tous les adeptes du débat" ? S'il s'agit de "quelques individus", Mariannes2.fr peut exercer une modération à postériori et donc facilement éliminer les commentaires illégaux ou hors sujet. En fait, si Marianne2.fr se fait chahuter, c'est bien parce que les internautes répondent sur le même ton que celui adopté par le média lui même. Apparemment cela ne plait pas aux auteurs qui critiquent de façon virulente et ad hominem, en vrac : la droite, le gouvernement, la gauche molle, la gauche, extrême, le capitalisme, la finance, la mondialisation, le libéralisme, etc, mais ne supportent pas la réciproque. Marianne2.fr l'avoue d'ailleurs explicitement : "nombre d’auteurs [...]nous ont fait savoir qu’ils en avaient assez de faire l’objet de quolibets et d’insultes."

Belle leçon de web en vérité, car pour critiquer sans être critiqué, pour tenir captifs ses lecteurs, pour les emprisonner dans une idéologie et des certitudes, il vaut mieux s'en tenir au bon vieux support papier. Marianne2.fr est en train de perdre en crédibilité, comme beaucoup d'autres organes de la presse papier reconvertis au web. Ils seront désertés par ceux, de plus en plus nombreux, qui recherchent un débat ouvert. Ils n'ont toujours rien compris à la société de l'information ouverte.

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Le 13 mai 2012

Chers Mariannautes,

Voilà maintenant une année, nous avons tenté de réformer le dispositif de commentaires de Marianne2.fr. La liberté presque totale des commentaires – souvent appréciée - aboutissait à des aberrations. Quelques individus addictes de l’invective et de l’éructation décourageaient de poster des commentaires tous les adeptes du débat. Notre système marchait sur la tête, préservant la délinquance verbale tout en chassant la conversation démocratique.

Il fallait donc réagir. C’est ce que nous avions fait en exigeant l’identification des Mariannautes. L’identification était destinée à favoriser la responsabilité. Parallèlement, nous avons resserré notre système de modération des commentaires. Pendant un temps, nous avons pu constater un certain nombre d’améliorations. La modération ne s’avérait nécessaire que sur quelques sujets très particuliers : le conflit du Moyen Orient, le racisme, l’antisémitisme. Nous étions ramené au lieu commun des sites d’information. En même temps, la progression de l’audience du site provoquait un accroissement exponentiel des commentaires : 5 000 parfois davantage chaque semaine.

Depuis quelques semaines, nous constatons une dérive grave des commentaires. Quel que soit le sujet, le point Goldwin est atteint en un temps record, et les mêmes imbécillités reviennent jour après jour : insultes, expressions racistes, dialogues idiots, etc. Cette dégradation des commentaires est inacceptable. D’abord parce qu’elle dispose une épée de Damocles au dessus de la tête du responsable juridique de site . Les hooligans du Net savent bien qu’ils ne risquent, eux, pas grand chose : Marianne2.fr est juridiquement responsable de tout ce qui y est publié. Ensuite, cette dérive décourage tous ceux qui souhaitent simplement débattre de façon courtoise des sujets qui les intéressent. Enfin, la transformation des forums en « pissotières sémantiques » finit aussi par dégouter nombre d’auteurs qui nous ont fait savoir qu’ils en avaient assez de faire l’objet de quolibets et d’insultes.

Nous avons donc décidé d’opter pour une mesure radicale : la suspension – provisoire – de tout commentaire. Nous ne renonçons pas à notre souhait de faire de Marianne2 un lieu de débats. Mais à un an de l’élection présidentielle, il nous faut réfléchir à de nouvelles méthodes pour décourager les « sauvageons » numériques, au lieu de les laisser chasser les lecteurs les plus fidèles de Marianne et marianne2. Il nous faut donc prendre le temps de la réflexion avant d’agir pour créer les conditions d’un débat démocratique, donc tolérant, et favoriser la consolidation de la communauté des Mariannautes. Nous savons bien que cette décision risque de déplaire ou de décevoir la majorité des Mariannautes qui aiment poster leurs commentaires et échanger entre eux. Comme on disait autrefois à la télévision, nous leur présentons toutes nos excuses pour cette interruption momentanée de nos commentaires.

L'équipe de Marianne2.fr

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