Pourquoi les prix de l'essence baissent

Une fois n'est pas coutume, TF1 rappelait fort intelligemment au 20 heures de lundi que depuis 1981, les prix de l'essence ont largement baissé.
Appliquant la méthode Fourastié, du nom du célèbre économiste, TF1 a (brièvement) publié sous forme du tableau ci-dessus le prix réel du litre d'essence, non pas en euros ou en francs constants, mais dans la seule valeur concrète qui permet de le mesurer, c'est à dire en heures de salaires nécessaires pour se le payer.
- Combien de litre d'essence pouvait-on obtenir en travaillant une heure en 1981 ?
- Combien de litre d'essence peut-on obtenir en travaillant une heure aujourd'hui ?
ou à l'inverse :
- Combien de temps fallait-il travailler en 1981 pour se payer un litre d'essence ? (quel était le "coût horaire" de l'essence).
- Combien de temps faut-il travailler aujourd'hui pour se payer ce même litre d'essence ? (quel est le "coût horaire" de l'essence).

Pour établir une comparaison valable il faut se baser sur le salaire d'une même catégorie professionnelle.

La méthode Fourastié utilise le salaire minimum, c'est à dire le SMIC,.comme unité de mesure.

Fourastié se basait sur un SMIC "chargé" c'est à dire augmenté des prélèvements obligatoires qu'il forfaitisait à 35% en 1981. Aujourd'hui les prélèvements obligatoires approchent les 50%

Tenant à vérifier les chiffres de TF1 nous avons appliqué une méthode Fourastié simplifiée en nous basant sur le prix de l'essence à la pompe et sur le SMIC horaire brut.

En 1981 SMIC horaire brut : 17 F et prix du litre d'essence 3,91 F

soit 17 / 3,91 = 4,3 litres / heure de travail

En 2008 SMIC horaire brut : 8,50 € et prix du litre d'essence 1,5 €

soit 8,5 / 1,5 = 5,7 litres / heure de travail

Nous ne tombons donc pas sur les chiffres de TF1 (il serait intéressant de savoir comment ils ont été calculés), mais incontestablement il y a une baisse importante. L'idée reçue ou "l'impression" que les prix augmentent n'est donc pas vérifiée, même pour l'essence pourtant soumise aux caprices monopolistiques des Etats "producteurs" et à une taxation féroce des Etats "consommateurs".

Contrairement à une autre idée reçue, les progrès techniques dans le domaine de la consommation des véhicules (au moins 30% de diminution entre 1981 et aujourd'hui) ont été réalisés non pas sous la pression de la hausse des prix de l'essence mais bien dans un contexte de baisse des prix relatifs de l'essence.
Le dogme selon lequel il faudrait que le prix d'un produit augmente artificiellement (taxes) pour que les industriels soient "obligés" de réduire la consommation est donc tout simplement faux. Ce qui a fait baisser la consommation des véhicules c'est l'expérience (accumulation des connaissances techniques) et la concurrence.

Pourquoi les prix baissent  de
Jean Fourastié et Béatrice Bazil est un must absolu, aussi fondamental que les sophismes économiques de Bastiat. Si vous n'avez pas encore lu ce petit bouquin, ruez vous sur les quelques exemplaires disponibles sur le net !

Il est d'ailleurs étonnant que le relève ne soit pas assurée et qu'il n'y ait toujours pas de suite à cet ouvrage paru en 1984.

A lire également cet intéressant compte rendu d'un colloque de février 2008 en hommage à Jean Fourastié, à la monnaie de Paris : "pouvoir d'achat réel, pouvoir d'achat ressenti".

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