Le préfet et les sans-papiers.

Daniel Canépa, Préfet du Nord l'a donc décidé : les sans-papiers grévistes de la faim qui n'ont pas signé le protocole de sortie de crise présenté par la préfecture et par plusieurs associations seront expulsés du territoire.

Il faut dire que pendant onze ans, depuis la grève de 1996, les régularisations de sans-papiers étaient plus nombreuses dans le département du Nord qu'ailleurs. En 2004 il y eut jusqu'à 450 grévistes, ce qui aboutit, après négociations, à des régularisations accordées par le gouvernement Raffarin.

Mais dorénavant Daniel Canépa n'a plus l'intention de se laisser faire, à chaque conférence de presse il proclame fièrement :
"Pendant 11 ans, on a fait une équation tout à fait anormale, grève de la faim égale régularisation. L'équation va changer [...] : maintenant, grève de la faim égale reconduite à la frontière, C'est cela la rupture !".

Or dans les deux cas le droit est bafoué.

Car pourquoi régulariser des sans-papiers qui font une grève de la faim? En quoi ont-ils plus de droits que tous les autres? Daniel Canépa avoue d'ailleurs avec aplomb : « Depuis un an, j'ai donné des papiers dans 40 % des cas, bien souvent à des étrangers qui ne rentraient pas exactement dans le cadre de la loi. »(propos rapportés par le Figaro du 23 août 2007)

Mais à l'inverse pourquoi menacer d'expulsion immédiate des sans-papiers qui font une grève de la faim? En quoi le fait de faire une grève de la faim supprimerait-il des voies de recours juridiques pour aboutir à une mise en rétention administrative puis à une expulsion? Le droit change t-il parce qu'on fait une grève de la faim? D'autant plus que si on menace d'expulsion ceux qui font grève, cela sous-entend que l'on n'expulsera pas ceux qui abandonneront leur grève. M. Canépa qui prétend "refuser le chantage des sans-papiers lillois" utilise donc les mêmes méthodes qu'eux !

Ce revirement de M. Canépa est une illustration parfaite de la justice d’État qui est mise en œuvre par les préfets. Du temps du gouvernement Raffarin le maintien de l'Ordre Public passait par la régularisation des sans-papiers grévistes. Ainsi en avait décidé le président Chirac au nom de sa morale alter-mondialiste de circonstance.

Avec Sarkozy cela change, une vraie morale de droite a pris le pouvoir et dicte les nouvelles recettes de l'Ordre Public. Dorénavant, on expulse, c'est la rupture !

Triste rupture, car l'intimidation, le mépris du Droit et les abus de pouvoir demeurent des instruments officiels, placés dans les mains des préfets, pour faire régner le sacro-saint Ordre Public.

"Nous ne voulons pas d’une justice d’État. Ce que nous voulons, c’est un État de droit."

(Phrase de clôture du discours sur la justice, lors du Congrès Fondateur d'Alternative Libérale, le 14 mai 2006 à La Cigale)
 

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