Gauche libérale - Mot-clé - PrisonValeurs libérales classiques de la gauche originelle. Droits de l'homme - liberté - laïcité - raison2024-03-01T19:42:20+01:00association gauche libéraleurn:md5:c8a69c990e3072db2745e87b929cd340DotclearLes dirigeants grecs iront-ils en prison ?urn:md5:48aa5e81ad5f9757532bfa0ddec760a12010-04-30T20:30:00+02:002019-10-31T10:26:14+01:00Alain Cohen-DumouchelActualitéfaillitegrècePrisonÉtat<p>Pour une société commerciale, la faillite se définit comme l’impossibilité à
un moment donné d’honorer ses créances. Il y a défaut de trésorerie donc
cessation de paiement.<br />
C’est une situation très improbable pour les États-nations puisqu’ils peuvent,
soit directement ponctionner le <img title="prison by jordan prestrot, avr. 2010" style="margin: 0 0 1em 1em; float: right;" alt="" src="https://www.gaucheliberale.org/public/images/.prison-jordan-prestrot_m.jpg" />peuple en levant plus d’impôts
et de taxes, soit emprunter sur les marchés avec la caution que représente ce
pouvoir coercitif de création de nouveaux impôts. Les comptes de l’État
français sont ainsi en déficit depuis 35 ans sans faillite, ce qui est
impossible pour une société privée. Bien entendu cette mécanique a ses limites
qui sont de trois ordres :</p> <p>Premièrement lorsque le niveau de l’imposition devient intenable il y a un
risque d’effondrement de l’économie. Faillite des entreprises, donc chômage et
baisse des rentrées d’impôt. La France n’est pas très éloignée de cette
situation avec un secteur marchand de plus en plus réduit qui sert de vache à
lait à l’ensemble de l’économie, et un État dont les dépenses croissent sans
cesse pour atteindre, selon les dernières estimations, 56% du PIB. La Grèce
elle n’est pas dans cette situation.<br />
<br />
Deuxièmement lorsque l’État, pour des raisons de corruption ou de
désorganisation, est incapable de collecter ses impôts. Nous sommes là
dans le cas de l’État grec, comme l’ont relevé les observateurs
internationaux.<br />
<br />
Troisièmement lorsque l’État, très endetté, sème le doute sur sa capacité à
honorer ses remboursements. Dans ce cas les taux vont augmenter pour couvrir
ses risques de défaillance. Dans le contexte grec, les taux à long terme ont
récemment grimpé à près de 12 %. La charge de remboursement de la
dette devient donc mécaniquement insoutenable. Le niveau de risque augmente
avec un risque d’emballement des taux, voire l’impossibilité totale d’emprunter
(credit hold).<br />
<br />
La Grèce se trouve donc dans les situations numéro deux et trois : les
impôts rentrent mal et l’emprunt est quasi impossible en raison de la défiance
du marché. Pour le marché, <strong>l’État Grec est donc bel et bien en
faillite</strong>. Son sauvetage ne pourra avoir lieu artificiellement qui si
d’autres États, ayant une meilleure côte vis à vis du marché, acceptent de lui
prêter à des taux <em>anormalement</em> bas. (ce qui pourrait d’ailleurs
s’analyser comme une faute grave de gestion).<br />
<br />
Dans une société privée, SA ou SARL, les dirigeants peuvent être poursuivis
après une faillite tant sur le plan civil que sur le plan pénal. Au civil, un
des motifs qui engage la responsabilité des dirigeants est : «
<em>la poursuite abusive dans un intérêt personnel, d’une exploitation
déficitaire qui ne pouvait conduire qu’à la cessation des
paiements.</em> » Les juges peuvent dans ce cas, étendre la faillite
de l’entreprise à ses dirigeants.<br />
<br />
Plus généralement en cas de « <em>fautes graves et caractérisées
ayant contribué à la faillite</em> », le tribunal peut prononcer à
l’encontre de tous les dirigeants impliqués une interdiction d’exercer
directement ou indirectement une activité commerciale ou d’occuper une fonction
de direction. En cas d’insuffisance d’actif, le tribunal peut également décider
que « <em>les dettes seront supportées, en tout ou en partie, avec ou sans
solidarité, par les dirigeants, de droit ou de fait, rémunérés ou
non.</em> »<br />
<br />
Au pénal on retiendra principalement l’abus de bien social et la non
présentation des comptes. Parmi les dispositions pénales du code du commerce on
peut citer l’article L241-3 : « <em>Est puni d’un emprisonnement de
cinq ans et d’une amende de 375 000 euros : (3e) Le fait, pour les
gérants, même en l’absence de toute distribution de dividendes, de présenter
aux associés des comptes annuels ne donnant pas, pour chaque exercice, une
image fidèle du résultat des opérations de l’exercice, de la situation
financière et du patrimoine à l’expiration de cette période en vue de
dissimuler la véritable situation de la société</em> . »<br />
<br />
Ces saines dispositions fonctionnent correctement pour les PME, c’est à dire
pour le <em>vrai capitalisme concurrentiel</em>. Elles fonctionnent nettement
moins bien pour les grandes sociétés par action qui sont à mi chemin entre le
secteur privé et le secteur public (<em>capitalisme de connivence ou
capitalisme politique</em>), enfin elles sont juridiquement inapplicables au
secteur public, et aux États qui peuvent être gouvernés et gérés absolument
n’importe comment, sans que la moindre sanction puisse être envisagée contre
leurs dirigeants. Pourtant, plusieurs des infractions énumérées ci-dessus
"collent" parfaitement à la situation grecque.</p>
<p>Il faut remarquer <em>qu’aucun</em> des responsables des grands pays
industrialisés et notamment des partenaires européens de la Grèce ne demande de
sanctions contre les dirigeants Grecs. Les politiques se préoccupent beaucoup
plus de détourner l’attention vers les banques d’affaire et les agences de
notation que de faire le ménage en leur sein ou d’établir de réels
contre-pouvoirs à leur propre délinquance financière et monétaire.</p>
<p>La communauté internationale a tout juste rendu possible la condamnation de
leurs dirigeants les plus sanguinaires ou génocidaires, mais de l’eau passera
sous les ponts avant qu’un chef d’État ou un gouvernement soit condamné pour
banqueroute.</p>
<p>L’irresponsabilité des États-nations et la confiance aveugle que le peuple
continue à leur vouer laissent pantois. Alors que le vrai capitalisme
concurrentiel se régule et se police très efficacement c’est, comme
d’habitude, le "marché" qui va être désigné comme bouc émissaire de la crise
étatique, dans la suite logique de ce qui s’est passé pour les "subprimes".</p>
<p>Les dirigeants Grecs n’iront donc pas en prison.</p>